Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La culture sous toutes ses formes
Archives
2 décembre 2008

Le miroir (Zerkalo)

ZerkaloDe: Andreï Tarkovski

Avec: Margarita Térékohva, Anatoli Solonitsyne, Nikolaï Grinko, Oleg Yankovsky, Alla Demidova, I. Daniltsev, Larisa Tarkovskaia,...

Pays: Ex-URSS

Année: 1974

Synopsis

Arrivé à la moitié de sa vie, un homme malade se penche sur son passé. C'est son enfance tout d'abord qui lui revient avec la vision de sa mère attendant le retour improbable de son mari, puis le souvenir de sa femme dont il s'est séparé le hante. Passé et présent se mélangent dans l'esprit d'un homme qui cherchait seulement à être heureux.

Avis

Le Miroir est probablement le film le plus personnel d'Andreï Tarkovski puisqu'il revient sur sa relation avec son père, son enfance et sur ses oeuvres précédentes. Ce film n'est autre qu'une autobiographie.
Il demeure néanmoins assez difficile d'accès. Le metteur en scène russe multiplie certaines références. Il parle de son passé. On va vite signaler que le cinéaste se complaît quelque peu dans la suffisance. Après tout, beaucoup de grands metteurs en scène possèdent un égo démesuré. On retrouve dans Le miroir, l'affiche de Andreï Roublev. Il faut aussi signaler l'incroyable plan-séquence dans lequel apparaît cette référence au second film de Tarkovski. La caméra se ballade dans une maison et y explore les différentes pièces. Ou d'une certaine manière, Tarkovski qui se remémore ses souvenirs. On entre de plein pied dans l'âme humaine. A noter aussi que la maison est celle de l'enfance de Tarkovski. Elle fut reconstruite exprès pour ce film. Les rêves d'enfance ou tout simplement les enfants chez le metteur en scène russe me rappelle, allez savoir pourquoi, son premier long-métrage qu'était L'enfance d'Ivan.
Le récit est construit de manière décomposée. Quand se déroule le présent, le passé ou le futur? On suit un homme, qui se rappelle sur son lit de mort ses souvenirs. La dernière chose qui le rattache à la vie avec ce moineau qu'il tient en main et qu'il ne lâchera qu'une fois mort. Doit-on y voir le symbole d'une âme emprisonnée dans un corps et qui s'élève ainsi vers le ciel une fois passé de vie à trépas? L'âme qui possèderait alors d'une totale liberté sans être attachée par une enveloppe charnelle.
Le téléspectateur est encore une fois plongé avec ce metteur en scène dans un monde onirique. Difficile de percevoir la réalité, l'instant présent du rêve. Toujours est-il que ce personnage, qu'on ne voit presque jamais est l'élément central du film. On le voit enfant. On voit ensuite son fils. On voit sa mère. On voit par après sa femme. L'absence du père se remarque dans les deux cas. Le complexe d'Oedipe semble aussi assez proche. Dans la plupart des relations on est confronté à celle d'une femme avec un enfant masculin. Il suffit aussi de se rappeler la scène du début. Un poste de télévision qui s'allume et un garçon qui souffre d'un problème de bégaiement. Une femme médecin va discuter avec lui. Elle va lui parler de ses souvenirs et l'enfant va réussir à parler beaucoup mieux. Une autre fenêtre sur l'âme du metteur en scène russe. Cette oeuvre, il s'en sert comme exutoire de tous ces moments critiques, difficiles peut-être tragique qu'il a pu connaître.
On revient un moment sur l'absence du père. Elle fut très forte chez Tarkovski. Son paternel n'est autre qu'un grand poète russe. Il possède ici un rôle même s'il n'apparaît pas une seule fois à l'écran. Les poèmes du film sont lus par Arsène Tarkovski. Ils sont également de sa composition.
L'un des grands atout de cette oeuvre, c'est que le téléspectateur peut s'immerger dans l'histoire. Les personnages, même s'ils possèdent une place importante dans le coeur de Tarkovski peuvent plus facilement être remplacé par des gens de nos propres visions. On peut s'identifier, me semble-t-il, à certains souvenirs. Le miroir nous le regardons. Et c'est nous que nous voyons dans celui-ci. Pas mal de personnages dans le film se regardent d'ailleurs dans un miroir.
Tarkovski signe un chef-d'oeuvre remarquable entre virtuosité technique (variation entre longs plans-séquences et plans fixes) et un voyage complet dans les profondeurs de l'âme. Certes, sa lenteur peut vite se transformer en ennui chez certains voire beaucoup. Mais tout de même, quand on apprécie, on reste muet tant c'est remarquable. Il semble aussi que le metteur en scène russe soit visionnaire puisque cet homme sur ce lit de mort, c'est lui. Il a une voix qui n'est pas celle d'un vieux en fin de vie naturelle. Tarkovski décèdera assez jeune d'un cancer des poumons...
Qu'importe, ses oeuvres ont marqué le cinéma...

Note: 5/5

   

Publicité
Commentaires
N
A noter d'ailleurs qu'un livre sort sur "le miroir" de Tarkovski le 19 juin aux éditions yellow now (ou eden now ?) si ma mémoire est bonne. Fans de Tarkovski, vous voilà prévenus. ;)
D
Bonsoir Benoît,<br /> "On peut s'identifier, me semble-t-il, à certains souvenirs."... Cela arrive, je le crois aussi. J'ai vu mon père tenter vainement de refouler ses larmes après avoir vu ce film, et essayer alors de me parler de choses dont il ne m'avait jamais parlé. Moi qui tenais déjà ce film pour extraordinaire, je n'avais donc pas fini d'en découvrir les forces, pour qui les reconnaît...
N
Peut-être le film le plus complexe du maître (avec "le sacrifice" personnellement) car sa structure est nullement narrative, à peine tient-elle du visuel, à la frontière entre souvenirs, rêves et visions. Sans doute son plus beau en tout cas, où chaque image, chaque plan devient un poème visuel et sonore où il faut se laisser porter (comme cette image du vent qui aplatit lentement les branches) pour apprécier pleinement le film. Magique, et universel, la fin me déchire toujours autant en pleurs.
La culture sous toutes ses formes
Publicité
Derniers commentaires
Publicité